Renaud MUSELIER, Président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Président délégué de Régions de France, accueillait Son Altesse Sérénissime le Prince Albert II de Monaco à l’Hôtel de Région.
Également aux côtés de Nasser KAMEL, Secrétaire Général de l’Union pour la Méditerranée, ils ont assisté à une présentation approfondie de l’initiative « PLIFF » (PAMEx Locally Investment Facility), facilité financière d’investissement dont l’objectif est de lever 1 milliard d’€ destinés spécifiquement à des projets environnementaux en Méditerranée. Cette présentation vient en préambule de la signature solennelle de la charte du « PLIFF » qui se déroulera demain (mardi 6 décembre), au Parc Chanot, lors de la seconde journée de Méditerranée du Futur.
A ce sujet voici l’intégralité du discours de Renaud Muselier :
Ouverture Méditerranée du Futur
Nous sommes réunis pour lancer ce 5e acte de Méditerranée du Futur
Depuis des décennies, on n’a jamais cessé de parler de tout ce qui unit les femmes et les hommes autour de la Méditerranée.
Avant tout parce que le monde méditerranéen est un monde complexe : écartelé entre violence et paix, entre civilisation et barbarie, entre humanisme et intégrisme.
On n’a jamais cessé de chercher le modèle de coopération qui permet de mettre en perspective ce dialogue nécessaire des cultures, des civilisations et des religions.
Président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, porte d’entrée méditerranéenne de la France comme de l’Europe, je ne pouvais pas rester inactif.
Il y a 5 ans, nous avons donc fait un pari un peu fou, avec le grand Antoine SFEIR : lancer Méditerranée du Futur, le rendez-vous des territoires euro-méditerranéens.
Le rendez-vous des gouvernorats, des régions, des unions de municipalités, des wilayas – le rendez-vous, en fait, des artisans du dernier kilomètre de la Méditerranée.
Avec un message à tous les Méditerranéens : travaillons ensemble !
A hauteur de femmes et d’hommes de bonne volonté, qui se souviennent qu’ils sont les héritiers du plus ancien bassin de civilisation et de vie du monde.
Avec nos forces mises en commun, pour bâtir cette union qui ne connaît ni Sud, ni Nord, qui ne fixe aucune hiérarchie entre les nations.
Avec un choix déterminé, les blocs d’amour contre les blocs de haine, pour construire avec ceux qui veulent une Méditerranée apaisée et prospère.
Avec la certitude que l’avenir de l’Europe se joue en Méditerranée, cette mer d’où vient sa richesse, et d’où viendra demain sa jeunesse et son élan !
C’est cela, Monseigneur, l’ADN de Méditerranée du Futur. Et Vous nous apportez Votre soutien depuis le premier jour. Bâtir la Méditerranée du Futur ne revient pas à faire table rase du passé. Ce n’est en aucun cas une page blanche. Au contraire, dans chacun de nos territoires, nous assumons tout, et nous regardons notre histoire dans les yeux. Comme les pères fondateurs de l’Europe lorsqu’ils ont créé la Communauté européenne.
La méthode est d’ailleurs la même : inciter, amener les territoires de Méditerranée à travailler ensemble, pour répondre ensemble aux défis de notre siècle.
Dès 2017, nous l’avions pressenti ensemble, Monseigneur – le 1er des enjeux de la Méditerranée, c’est l’impact du dérèglement climatique.
Dans Son discours à la COP 27, Votre Altesse sérénissime, Vous avez rappelé que notre mer concentre la plupart des enjeux de ce siècle, à commencer par les enjeux environnementaux et climatiques.
Il y a 5 ans, Méditerranée du Futur nous a permis de nous engager à vos côtés :
- Nous avons ainsi lancé, en 2017, la stratégie « Une COP d’avance », qui nous a permis de
consacrer 20, puis 30, puis 40% de notre budget contre le réchauffement climatique. Autour
de cinq piliers clairs : air, mer, terre, énergie, déchets. - Nous avons engagé des partenariats sur le climat avec le Costa Rica et Djibouti, devenant la
première région de France à conventionner avec des Etats souverains : avec le Costa Rica,
première destination éco-touristique du monde ! Avec Djibouti, à la demande du Président de
la République, pour lancer l’Observatoire régional de recherche sur l’environnement d’Afrique
de l’Est.
Sur cette base, nous sommes devenus, le 14 novembre dernier, la région-pilote de la planification écologique en France, sur décision de la Première Ministre.
Et le 16 décembre prochain, nous adopterons le premier budget vert d’Europe, 100% dédié au climat – une première sur le bassin méditerranéen.
En 2018, nous avons consacré le 2e acte de Méditerranée du Futur à notre jeunesse, pour entendre la voix de cette génération qui vient.
Elle incarne, par définition, notre avenir et notre énergie, et nous devons lui donner de l’espérance, de la formation et des moyens.
Il en est resté cette Assemblée méditerranéenne de la jeunesse, qui a continué d’exister jusqu’à aujourd’hui, et dont plusieurs membres seront à nos côtés.
En 2019, pour le 3e acte de Méditerranée du Futur, nous avons mis l’accent sur les investissements, en créant le Club des investisseurs de la Méditerranée. Cette initiative a permis d’aboutir, trois ans après,à ce fonds climat d’1 milliard d’euros.
En 2020, au cœur de la pandémie, 300 ans après l’arrivée de la peste à Marseille, nous avons consacré le 4e acte aux questions de santé et de résistance aux pandémies. Avec, à l’issue, un appel à projets méditerranéen sur les questions de santé, qui a permis de mobiliser 1,3 million d’euros pour 7 projets concrets, dans nos territoires de coopération.Voilà l’ampleur du chemin parcouru, voilà le sens de cette démarche.
Et c’est sur ces fondations que s’ouvre ce 5e acte tout à fait unique
Au fil de ces années, de ces échanges et de ces travaux, j’ai pu mesurer à quel point la Méditerranée se transformait, évoluait. Partout sur les rives de notre mer, le sujet revenait, toujours plus fort. L’agriculteur marocain affronte la même intensité de sécheresse que l’agriculteur du sud de l’Italie.
Les ports de Tunis, d’Alexandrie et de Marseille sont tous confrontés aux mêmes attentes de leurs populations, pour moins de pollution, moins de nuisances.
L’effondrement de la biodiversité est observable dans nos zones humides, nos tourbières et nos mangroves, au Maghreb, au Machrek ou en Camargue !
La gestion de la ressource en eau est une priorité pour la Corse, pour la Sicile, comme pour Rhodes, Malte et la Sardaigne !
Le dérèglement climatique produit déjà ses effets sur le bassin méditerranéen, plus que partout ailleurs dans le monde.
Certains nous voient donc comme un laboratoire, une terre d’expérimentation.
C’est en partie vrai, parce que notre quotidien du jour sera celui de demain pour des milliards d’êtres humains sur Terre.
Mais nous, nous y vivons, aujourd’hui et maintenant !
Nous y construisons notre destin, patiemment. Nous y fondons nos familles, nous y plaçons nos espérances et nos projets !
Nous devons donc prendre notre destin en main
Alors, avec l’appui de tous nos partenaires, à commencer par l’Union pour la Méditerranée, on s’organise, on imagine et on construit les solutions de demain. Et là où nous menons depuis longtemps la lutte contre le réchauffement climatique, nous sommes désormais engagés dans l’adaptation à ses
effets.
Ensemble, nous sommes les dépositaires d’un héritage fantastique où la philosophie fut grecque, le droit fut romain, la puissance ottomane, l’harmonie italienne, la rébellion catalane, la liberté française,l’éternité égyptienne – et la protection de l’environnement monégasque !
Nous sommes donc liés et destinés à faire face au défi du siècle ensemble. Avec l’Union pour la Méditerranée, qui accomplit un travail remarquable et décisif partout dans nos territoires de coopération, comme dans toutes la Méditerranée.
Les territoires de Méditerranée doivent ouvrir la voie, éclairer le chemin, pour nos populations, comme pour le reste du monde.
Voilà pourquoi nous ferons désormais de Méditerranée du Futur le rendez-vous mondial de l’adaptation au dérèglement climatique, chaque année.
A la résignation et la nostalgie, nous opposerons action et détermination sans faille. C’est le sens du fonds d’investissement qui vous a été présenté il y a quelques minutes. L’heure n’est pas, et n’a jamais été, aux bavardages.
Dans nos territoires, nos concitoyens attendent des actes, des projets, des infrastructures qui nous permettront de traverser les décennies à venir !
Ils attendent une véritable culture de la préparation, à tous les risques, à toutes les conséquences de ce réchauffement climatique.
Et pour atteindre cet objectif, il faut mobiliser des moyens importants et nouveaux
Ici en Région Sud, nous avons été à l’initiative de plusieurs événements de dimension mondiale ces dernières années. Ils sont tous venus confirmer notre intuition :
- Le Sommet des deux rives, en juillet 2019,
- Le Congrès mondial de la nature de l’UICN, en septembre 2021,
- Le Forum des mondes méditerranéens, en février 2022,
- Le Sommet européen des villes et des régions, en mars 2022.
Quand on met en perspective cet enchaînement de dimension mondiale, on mesure mieux à quel point nous sommes devenus une région centrale. Et à chacun de ces événements, nous faisons le même constat : comment avancer si nous ne dégageons pas des moyens supplémentaires, au-delà des crédits publics ?
Dans ma région, nous avons déjà accéléré, avec 30 milliards d’euros directement planifiés et engagés pour le climat :
15 milliards de crédits régionaux jusqu’en 2028, sur la base de nos engagements
- 10 milliards de crédits européens d’ici 2028, avec une organisation claire,
- 5,1 milliards de crédits d’Etat d’ici 2027, avec le Contrat de plan Etat-Région.
Mais pour rayonner au niveau euro-méditerranéen et mondial, nous avons besoin d’un outil complémentaire, d’un instrument à la hauteur des enjeux.
Nous avons besoin de ce fonds méditerranéen, de cet instrument qui structure cette fédération d’énergie, de volonté et de moyens !
Mais nous avons aussi besoin qu’il soit opérationnel et organisé.
Il ciblera donc des projets concrets, avec un calendrier qui vous a été présenté :
L’électrification des quais dans les ports de Méditerranée
- Des infrastructures dédiées à l’hydrogène vert comme le pipe-line entre la Catalogne, Madame la Ministre, et la Région Sud : un dossier décisif !
- Et bien sûr des initiatives Zéro plastique dans nos villes côtières.
Monseigneur,
Ce n’est pas seulement en voisin et en ami que Son Altesse Sérénissime nous fait l’honneur de Sa venue, mais en tant qu’acteur essentiel de cette Méditerranée du Futur. En novembre 2019, le Président de la République Emmanuel MACRON a rappelé l’importance des liens unissant la République Française et la Principauté de Monaco. Notre région Provence-Alpes-Côte d’Azur y joue naturellement un rôle singulier.
Pour des raisons géographiques, d’abord
Le territoire régional est ainsi fait qu’il s’enorgueillit chaque jour de connaître une telle proximité, une telle « communauté de destin » avec la Principauté de Monaco. En tant que prince Souverain de Monaco, Vous mesurez chaque jour l’importance de cette coopération pour vos sujets.
Pour des raisons humaines, ensuite.
40.000 habitants de notre région se rendent chaque jour à Monaco pour aller travailler, avec un chiffre en hausse constante depuis 25 ans. Cela engage des responsabilités colossales de la part des autorités organisatrices de transport, aux collectivités compétentes en matière économique. Cela implique une
solidarité totale entre nous, pour garantir ce flux vital. Pour des raisons politiques, enfin.
Ou plutôt de choix politiques déterminés et déterminants, face au dérèglement climatique. Son Altesse Sérénissime incarne, depuis 2005, un pôle de sensibilité, d’alerte et d’action sur l’ensemble des questions climatiques. Et Sa famille est engagée en ce sens depuis longtemps, avec beaucoup d’anticipation et de préscience.
Je n’oublie pas que Monaco abrite, grâce à Votre trisaïeul le prince Albert Ier, un Institut Océanographique de dimension mondiale, et son Musée Océanographique, depuis 1910. J’oublie – encore moins – la création par Son Altesse Sérénissime de la Fondation Albert II, en 2006,
qui rayonne dans le monde entier pour promouvoir le développement durable.
Notre capacité à travailler ensemble, à avancer sur les mêmes projets, est donc à la fois naturelle et décisive.
Depuis 725 ans, Monaco fend les vagues de l’histoire, toujours en avance sur son temps, sans jamais renoncer à ce qui fait l’identité profonde de la Principauté.
Deo Juvante, Monseigneur, comme le proclame la devise de Votre famille et de la Principauté – « avec l’aide de Dieu » !
Avec beaucoup d’humilité, laissez-moi Vous dire, Monseigneur, que Vous pouvez aussi compter sur l’amitié et le soutien de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Nous avons ici, sur le territoire régional, des amis de la Principauté de Monaco. Ils sont nombreux ce matin, à commencer par les étudiants et les professeurs de l’Institut Portalis d’Aix-en-Provence.
L’histoire de Monaco est une aventure euro-méditerranéenne que nous admirons tous.
De la seigneurie guelfe des origines, jusqu’à la principauté du Prince Honoré II, et l’essor connu aux temps de Charles III, De l’arrivée de Sainte Dévote à l’élévation à la dignité de siège archi-épiscopal en 1981, De la contribution de deux galères monégasques à la bataille de Lépante, en 1571, jusqu’à la
reconnaissance comme membre par les Nations Unies en 1993. Tout dans Votre histoire nous unit, et nous rassemble.
2023
En 2023, je serai particulièrement honoré de signer, avec Votre Gouvernement et l’Etat français, une convention de coopération qui scellera nos engagements communs, avec une priorité donnée au climat et au transfrontalier.
Je serai particulièrement attentif au projet d’Académie du droit de la mer, que Vous portez avec beaucoup d’attachement, et dont nous évoquerons l’avenir ensemble ce matin, au musée Cosquer Méditerranée.
Voilà, Monseigneur, Mesdames, Messieurs,
Cette 5e édition de Méditerranée du Futur débute aujourd’hui autour d’un invité de marque, un chef d’Etat parmi les plus engagés du monde pour le climat.
Cette 5e édition rencontre un succès historique avec des ministres, des walis, de gouverneurs, de présidents de région et de collectivités de la Méditerranée tout entière, et bien au-delà !
Cette 5e édition débute avec la guerre aux portes de l’Europe, et nous avons la chance d’avoir à nos côtés l’Ambassadeur d’Ukraine en France, et le Vice-Gouverneur de l’oblast d’Odessa à nos côtés !
Rien de ce qui se passe dans le monde ne peut échapper à notre regard méditerranéen, Et rien de ce qui se passe en Méditerranée ne peut être indifférent au reste du monde. Voilà pourquoi je suis particulièrement heureux, ce matin, de lancer cette édition à Vos côtés, et de lui donner cette impulsion franco-monégasque si importante pour notre Méditerranée.